Aujourd’hui, alors que les informations sillonnent dans tous les sens la planète, les dangers à naître du monde virtuel d’Internet et des technologies se propagent à une vitesse exponentielle. « Tout le monde le dit à tout le monde, qui le dit à tout le monde… »
Les pouvoirs d’internet ont déjà été discutés dans l’article suivant, intitulé Une joyeuse cavalcade numérique. Cet article porte maintenant sur l’envers de la médaille, les dangers d’Internet.
Le cyber-harcèlement
De blanc immaculé, on devient du jour au lendemain du noir le plus affreux, le plus détesté de tous les êtres. Internet et les médiaux sociaux comportent leurs dangers. Le cyber-harcèlement existe dès qu’on se sert d’Internet avec l’intention de vous humilier ou de vous ostraciser dans un groupe. Avec surprise, une enquête indépendante révèle que les cyber-harceleurs sont d’habitude les plus faibles et non les costauds de la classe. Si ce n’était de cette façon virtuelle et indirecte, ils n’oseraient jamais confronter leurs victimes dans un fond d’une cour. Le harcèlement existe depuis toujours. Il peut même se pratiquer au féminin par une patronne envers son employé, comme un excellent film de 1994 avec Demi Moore et Michael Douglas en donne l’exemple, basé sur un roman de Michael Crichton.
Il ne s’agit pas d’imaginer des ennemis sournois tapis à tous les coins de rue, avec l’intention de nous nuire. Il s’agit d’être prudent en respectant certaines consignes avant que le mal arrive, comme après, si tel doit être le cas.
Pédale douce, sur les poursuites !
Si un cyber harcèlement survient, soyez d’une immense prudence avant de brandir des menaces de recours en justice. Il se peut que certaines de vos phrases, gauches ou déformées, jettent de l’huile sur le feu au lieu de l’éteindre. Aux États-Unis, un père l’a appris à ses dépens en juillet 2010 en prenant la défense de sa fille de 12 ans : coupable d’avoir mis des photos d’elle-même sur YouTube et de les avoir assorties de propos personnels destinés à régler des comptes avec d’autres internautes. Le père déclare qu’il possède les adresses des coupables. On se moque de lui. Des internautes obtiennent son adresse et son numéro de téléphone. Ils appellent sans arrêt. Ils font livrer des pizzas à son domicile. L’affaire « Jessi Slaughter[1] » est très bien résumée par Thérèse Jeunejean et Gilles Ernoux, deux auteurs belges, à la page 39 de leur excellent carnet Facebook et les réseaux sociaux, publié en 2012.
Si vous êtes cyber-harcelés, La police et la justice offrent certains recours de défense. Ils ne sont pas faciles à exercer. Les résultats peuvent être aléatoires. Ne tardez pas avant de consulter pour demander de l’aide.
La prudence conseillée
Par rapport à Facebook et aux réseaux sociaux, les auteurs belges précédents concluent que, pour les apprécier, comme pour le livre, le train, de l’auto et la télévision il faut savoir les utiliser avec prudence, ou l’apprendre. Ils écrivent :
Pour en tirer le meilleur profit, un seul mode d’emploi fonctionne bien : il faut, impérativement, en apprendre le fonctionnement et l’appliquer correctement. Il s’agit aussi d’y recourir à bon escient sans leur laisser prendre toute la place dans une vie[2].
Le président Obama affirmait en 2009 aux élèves d’une école secondaire de Virginie : « Je veux que vous soyez prudents quand vous affichez quelque chose sur Facebook, parce qu’à l’ère de YouTube, tout ce que vous faites ressortira un jour dans votre vie. Et quand on est jeune, on fait des erreurs et on fait des bêtises[3].
« Internet a la mémoire longue ! Tout ce qui se lit, s’échange, se partage, s’affiche sur le Web est “archivé” et peut rester stocké et accessible à tous pour très longtemps[4] », affirment les deux autres auteurs belges Thérèse Jeunejean et Gilles Ernoux.
Rappelez-vous toujours que vous perdez tout contrôle sur les destinataires auxquels vos « amis » envoient vos photos et vos informations après les avoir reçues. Que ne voilà-t-il pas une raison pour ne pas craindre de restreindre les paramètres de diffusion pour les plus confidentielles. Ces paramètres sont là, pour vous protéger. N’ayez pas honte de vous en servir.
Le cas des photos
La facilité de la photo numérique, le téléphone cellulaire avec la fonction prise de photos et Internet multiplient, semble-t-il, les causes d’exposition. Toutefois, avant d’envoyer vos photos au grand « at large » n’importe qui, soyez prudents. Certaines d’entre elles, sorties de son leur contexte, peuvent se transformer des années plus tard en un sujet d’embarras pour vous. Demain peut cacher toutes sortes d’embêtements. Un ancien amoureux sera parfois tenté d’en publier une par vengeance pour montrer le côté moins honorable de vous. Il cherchera à vous déprécier.
Que lit-on ? Que bon nombre d’employeurs glanent sur Facebook la réponse aux questions personnelles qu’ils ne posent plus à l’entrevue d’embauche : sur l’orientation sexuelle, la religion, voire si le candidat n’a pas laissé derrière lui quelque « tache » inavouée. Quelquefois c’est le sujet qui affiche lui-même plein écran, sur son site, la part qu’il a prise à certaines virées plutôt osées ou arrosées.
Autre aspect à bien noter : Facebook devient et reste propriétaire de toutes les photos que vous placez sur le réseau. Il ne précise jamais pendant combien d’années il les gardera. On lui a demandé d’éclaircir ce point. Il l’a refusé. En les revendant un jour, il fera toujours infiniment plus d’argent que vous avec les prétendues récompenses virtuelles du réseau.
Selon Jeunejean et Ernoux, les auteurs belges précédemment cités, Facebook a établi, dans sa propre recherche, qu’une connexion sur 1600 est malveillante parmi le plus d’un milliard de ses utilisateurs quotidiens. Ces 600 000 imposteurs n’aspirent qu’à accéder « à des messages, infos ou photos des inscrits… »[5]. Ils les recherchent dans une intention malhonnête.
Les principaux conseils
Commandité par HabiloMédias, Bell et Microsoft Canada, le site Webaverti offre depuis 2004 des conseils de sécurité pour les jeunes étagés par groupes d’âge :
- 2-4 ans
- 5-7 ans
- 8-10 ans
- 11-13 ans
- 14-17 ans.
D’après le sondage « Jeunes Canadiens dans un monde branché », publié en 2005 par le Réseau Éducation-Média, 94 % des 50 sites préférés des enfants et adolescents prélèvent des informations privées. «Les données recueillies servent ensuite Les données recueillies servent ensuite à monter des campagnes de promotion qui ciblent spécifiquement les jeunes par groupes d’âge ou même comme individus »[6]. Elles mènent, dans quelques cas, de grâce, qu’on n’imagine pas dans tous, à la réception de pornographie à domicile. Aux États-Unis, la loi[7] oblige les sites commerciaux à obtenir le consentement des parents avant de recueillir des renseignements d’enfants de moins de 13 ans. Connaissant nos habitudes nord-américaines, cette protection s’étend probablement assez souvent au Canada. Un enfant peut toutefois se faire passer pour plus vieux qu’il n’est.
Heidi De Pauw croit ainsi que les jeunes doivent démontrer à leurs aînés leur capacité à utiliser sagement les réseaux sociaux, car avec ceux-ci (et leur nouvelle tournure d’expression syncopée) « ils deviendront l’étendard de la démocratie »[8].
Les principaux conseils à leur donner pour éviter le cyber-harcèlement sont :
- d’utiliser les paramètres de confidentialité pour restreindre la diffusion de vos messages (après avoir lu ce qui est écrit en petit);
- de ne pas répondre à des inconnus;
- de s’abstenir de langage blessant; et
- de ne pas afficher de photos imprudentes.
Les banques de données
En tirant des renseignements personnels anodins, d’un fichier et puis d’un autre et d’un autre, les banques de données aboutissent parfois à créer un dossier hostile. Peut-être moins connu, mais non moins présent pour la clientèle, est le fait que les renseignements donnés lors des achats par cartes de crédit permettent d’identifier les amateurs de tels produits de telles marques dans tel quartier donné. Comme pour les jeunes plus haut, ces données servent aussi à cibler la publicité. Les compagnies savent à quels foyers envoyer les circulaires et les bons de rabais.
À surveiller sera la poursuite collective qu’entend prendre Max Schrems, un étudiant au doctorat en droit en Autriche, contre Facebook parce qu’il l’accuse de ne respecte pas les lois sur la protection de la vie privée en Europe. « Le problème, c’est qu’ils ont pris les lois californiennes sur la vie privée et qu’ils les ont traduites en allemand, en espagnol, en italien sans se soucier véritablement des lois nationales[9] », affirme-t-il.
Que ce dossier soit marqué comme important et à suivre !
Un peu de prudence
Ça ne donne rien d’exagérer les dangers d’Internet et des technologies. Ni de les nier. Mieux vaut les connaître et prendre les moyens pour éviter de trébucher dans les pièges les plus visibles. Un peu de prudence règle souvent tout.
[1]. Le véritable nom de la victime est Jessi Leonhardt.
[2]. Thérèse Jeunejean et Gilles Ernoux, Facebook et les réseaux sociaux,Bruxelles, Groupe De Boeck, 2012, p. 47.
[3]. Cité par David Kirkpatrick, La révolution Facebook, traduit de l’anglais par Bernard Sigaud, Paris, JC Lattès, 2010, p. 279.
[4]. Manuel Briard et Audrey Bontemps, Entrez dans la toile de mon réseau, Liège, Edi pro, 2009, p. 144.
[5]. Jeunejean et Ernoux, Facebook et les réseaux sociaux,Bruxelles, Groupe De Boeck, 2012, p. 37.
[6]. Source : http://www.webaverti.ca/french/Privacy Invasions.aspx
[7]. Le Children’s Online Privacy Protection Act (COPPA)
[8]. Heidi de Pauw, citée, directrice générale « e-safety » de Child Focus, signataire de la préface de Thérèse Jeunejean et Gilles Ernoux, Facebook et les réseaux sociaux, p. 5.