La défense ne sait plus trop comment s’organiser alors que les drones sont entrés dans la vie du XXIe siècle.
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Légers et portables, les missiles sol-air ont fait baisser près du niveau de zéro la sécurité pour les avions à basse altitude. Viendra peut-être un jour où les drones poseront un problème de sécurité pour les populations civiles, si les terroristes se mettent à les utiliser. Ils pourraient passer au-dessus d’une ville et laisser tomber une charge d’explosifs ici et là. En puissance, elle serait limitée. Mais l’effet d’insécurité qui en résulterait serait énorme. Le cas échéant, ces minuscules aéronefs pourraient disséminer des produits toxiques.
Jusqu’à maintenant, on a vu les grandes puissances se servir de ces minuscules avions téléguidés et sans pilote en zone de combat. On leur attribue un haut degré de précision. Ils nous impressionnent pour cette qualité. On admet maintenant que les drones font aussi des victimes collatérales : des civils, aussi souvent que des militaires, qui décèdent aux côtés et en même temps que la tête d’affiche au moment où elle est visée. Qu’arrivera-t-il le jour où les terroristes et révolutionnaires apprendront à se servir de ces drones ? Pourront-ils en faire une arme menaçante, tout à fait différente d’un jouet ?
Au Canada, la GRC a souhaité récemment qu’on établisse un meilleur contrôle sur la dissémination de ces avions sans pilote[1]. À l’heure actuelle, les conditions d’utilisation semblent aussi floues et imprécises. Elles le sont autant que les pseudo-règles de Facebook et autres apparentés concernant les limites à respecter et à ne pas dépasser entre le contenu public et le contenu privé pour les abonnés[2].
Qui dit règlementation s’oblige à envisager une possible réaction hostile de la part des compagnies fabricantes et des distributeurs. Est-il besoin de citer l’exemple du tabac partout et surtout celui, aux États-Unis, du contrôle des armes à feu ? Il y aura des gens qui soutiendront que le gouvernement ne doit pas réglementer les loisirs; ni brimer les droits individuels. Donner un point de vue unique de la défense est impossible. Churchill, alors qu’il dirigeait durant la Deuxième Guerre mondiale la défense de l’Angleterre et de l’Europe, a essuyé les critiques d’une frange de pacifistes affirmant qu’il n’aurait pas dû combattre.
Les guerres oubliées
D’autre part, en matière de défense, le philosophe français Bernard-Henri Lévy, chroniqueur au magazine Le Point, soulève une autre alerte. C’est que notre XXIe siècle devrait se préoccuper davantage de ces guerres larvées, non finies, qui pourrissent partout et que nous laissons traîner derrière nous. Il affirmait dans un livre de 2001 :
Bref, va-t-on saisir l’occasion, enfin, de rompre le silence et d’imposer sur la scène mondiale le problème de ces guerres oubliées dont nous sommes quelques-uns à dire à qui veut l’entendre, c’est-à-dire, pour l’instant, pas grand monde, que c’est le problème majeur du siècle qui commence et que c’est sur notre capacité, ou non, à l’affronter que nous serons jugés[3] ?
Bernard-Henri Lévy, juif, ne se cache. Il dénonce la promptitude des autres pays à accuser Israël de racisme et de crimes contre l’humanité en oubliant « la chape de plomb qui pèse sur ces terres de désolation et de crime que sont l’Angola, le Burundi, le Sri Lanka, la Colombie, le Soudan », cite-t-il. Sa liste pourrait s’allonger jusqu’à inclure certains pays en Amérique latine où sévit une guerre entre les gouvernements et les barons de la drogue. Car nous sommes formés à appeler maintenant « locaux » tous ces conflits, tellement nous avons peur d’une Troisième Guerre mondiale qui nous effraye en raison de la bombe atomique. Serait-ce kafkaïen d’imaginer qu’un jour nous puissions finir par avoir une multitude de ces guerres s’étendant à toute la planète – c’est-à-dire que nous aurions la même chose qu’une Guerre mondiale, moins le nom ?
Le journaliste et auteur français Thierry Desjardins soutient : « Le maquisard a besoin des journalistes, le militaire les redoute; le maquisard parle politique, le militaire n’a que des secrets[4]. »
Yvette Granier-Barkun, dans un essai publié à Ottawa[5], et Jason Burke, de l’hebdomadaire britannique The Observer, affirment qu’on ne peut se fier au seul arsenal militaire pour écraser le terrorisme[6]. Il en faut quand même un.
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Organiser la défense est compliqué aujourd’hui en ce qu’il faut penser à grand et à petit, en même temps. Il faut assurer la sécurité et respecter les libertés civiles.
[1] Hugo de Grandpré, « Les drones préoccupent la GRC », La Presse, 26 février 2015. Consulté sur Internet.
[2] Guy Gendron, « You’re stalking to me ? », Libération, France, 1er juillet 2015.
[3] Bernard-Henri Lévy, Réflexions sur la Guerre, le Mal et la fin de l’Histoire, précédé de Les Damnés de la guerre, Paris, Bernard Grasset, 2001, p. 402.
[4] Thierry Desjardins, Les rebelles d’aujourd’hui, Paris, Presses de la Cité, 1977, p. 106.
[5] Yvette Granier-Barkun, Lettres urgentes au vingt et unième siècle, Ottawa, Vermillon, 2003, p. 132.
[6] Jason Burke, Al-Qaïda. La véritable histoire de l’islam radical, traduit de l’anglais par Laurent Bury, Paris, La Découverte, 2005, p. 17.